Ils coulent. Ils suintent. Leurs limites sont indéfinissables.
Les champignons, voyez-vous, ne se comportent tout
simplement pas comme des organismes devraient se comporter. Ils coulent. Ils
suintent. Leurs limites sont indéfinissables. Ils emplissent l’air de leurs
spores et infiltrent le sol avec leurs sinuosités. Leurs fibres semblent s’y
ramifier, s’y étendre. Ce que nous voyons à la surface du sol ne sont que des
organes de fructifications […]
Mais il en va également ainsi avec les
hommes. Ils ne vivent pas à l'intérieur de leurs corps, comme les théoriciens
de la société se plaisent à l'affirmer Leurs traces s'impriment sur le sol, via
leurs empreintes, leurs sentiers et leurs pistes ; leur souffle se mêle à
l'atmosphère. C'est pourquoi j'en suis venu à interroger ce que nous entendons
par "environnement", pour finalement ne plus le concevoir comme ce
qui entoure (ce qui est "là-dehors" et non "ici dedans") mais
comme une zone d'interpénétration à l'intérieur de laquelle nos vies et celles
des autres s'entremêlent en un ensemble homogène.
Tim Ingold in Marcher avec les Dragons
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